LEIRIS (Michel).

Lot 234
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LEIRIS (Michel).
45, rue Blomet. MANUSCRIT AUTOGRAPHE. 10 feuillets in-8. Manuscrit de travail, très raturé avec de nombreux ajouts en marges. Belle évocation autour des années 1924-25 du petit groupe qui se réunissait dans l'atelier d'André Masson et celui de Miró. Ce texte, très remanié et complété, sera publié dans La Revue de Musicologie (Tome 68, n°1-2, 1982, pp. 57-63), puis dans Zébrage en 1992. C'est le grand goût du « merveilleux » qui aura été le lien entre les gens du cénacle de la rue Blomet (Masson, Tual, Limbour, Artaud, Salacrou, moi-même et un peu plus tard Miró) et c'est ce qui les a presque tous amenés à adhérer au surréalisme. Par rapport au merveilleux surréaliste (plus irrationnel, plus onirique et comme parachuté d'ailleurs), notre merveilleux - à l'origine - semblait émaner des choses, dont il n'aurait été que la transfiguration (cf. les Oeuvres de Masson exécutées à cette époque : dessins et aquarelles érotiques, forêts, natures mortes aux éléments évocateurs, hommes attablés pour le jeu ou pour le repas, etc.) ; cf. également l'Enfant polaire de Limbour, sorte de rêverie à partir des manuels enfantins de géographie. Pour nous qui - à la différence de Breton, Aragon, Eluard, etc. - n'étions pas passés par Dada et entendions, certes, être à quelques degrés des novateurs, mais ne cherchions pas à casser les vitres - il ne s'agissait pas de s'insurger contre la tradition mais plutôt de la renouveler, sans renoncer à y plonger nos racines. A la différence du merveilleux surréaliste, le nôtre reposait moins sur des rencontres insolites que sur la mise en jeu de secrètes harmonies. Tout au début on aurait pu appliquer à Miró comme à Masson, ce que Max Jacob a écrit dans son Art poétique : « Je rêvais de recréer la vie de la terre dans l'atmosphère du ciel ». Aux deux extrêmes il y avait les deux hommes de théâtre, Artaud l'acteur et Salacrou le dramaturge, l'un soucieux presque exclusivement de résoudre par l'expression poétique le problème d'identité avec soi qui le rongeait, l'autre qu'animait comme nous le goût de la poésie peinte ou écrite mais qui jugeait possible de la rendre accessible à un large public. Amateurs de musique, de danse, buvant volontiers, et mesurant toute l'importance du désir charnel, avant même de nous être initiés à Freud (l'un des grands ressorts de la vie comme de toute activité artistique), si nous n'avions été des athées, le dieu que nous aurions eu eut été un dieu de l'espèce de Dyonisos, à la fois sombre et joyeux. Masson et aussi bien Miró étaient des plasticiens qui, tout en se proposant des buts autres que proprement picturaux, se gardaient de rejeter les leçons de leurs prédécesseurs et savaient fort bien que la peinture est un art de la main autant que de la tête.
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